Saint-Pierre et son église

Dans les actes antérieurs au 16ème siècle, Saint-Pierre des Tripiers est connu sous le nom de Sanctus Petrus de Stirpetis. Lorsque le français fut substitué au latin dans les actes publics, de stirpetis devint d'Estripiers, des Tripiés, puis des Tripiers.

Le prieuré de Saint Pierre des Tripiers

L’église actuelle du village de St Pierre des Tripiers, ainsi que l’ensemble des bâtiments qui l’entourent ont un long passé. Leur construction remonte au début du Moyen Age, à une époque où, après une période de grande insécurité, les Causses retrouvent vie.
Après avoir été régulièrement peuplée et exploitée dans les premiers siècles de notre ère, comme en témoignent de nombreux vestiges archéologiques, la région connaît un déclin très marqué. Elle subit diverses vagues d’invasions (wisigoths, sarrasins, francs …) puis les conflits liés à l’éclatement de l’empire carolingien. Aux alentours de l’an 1000, la stabilité revenue, la population s’accroît, entraînant de nouveaux besoins alimentaires. Des terres délaissées depuis des lustres sont remises en exploitation, de nouveaux espaces sont défrichés.
Le nom même de la commune est un témoin de ce mouvement : « Sanctus Petrus de Stirpia », c’est saint Pierre des Essarts (de essarter : défricher un terrain boisé en brûlant les bois inutiles et répandant les cendres sur les sols). L’ignorance de la langue d’oc par l’administration, alliée à une orthographe fantaisiste ont altéré, au 19ème siècle, ce nom en « tripiers » bien qu’il n’y ait, dans l’histoire du lieu, aucune trace de « marchands d’abats et autres bas-morceaux »
Cette renaissance, aux alentours de l’an 1000, s’accompagne d’une grande expansion des ordres monastiques qui en furent d’ailleurs l’un des puissants moteurs. Sous l’impulsion des familles de la noblesse locale, les moines bénédictins prennent pied dans la région des Causses. Dès le milieu du 11ème siècle, les grandes abbayes du Languedoc acquièrent des domaines dans la contrée. En 1061, Pierre, Guifrèd et Bernard, fils de Raimon de Capluc donnent à l’abbaye d’Aniane (Hérault) l’église et le lieu d’Entraygues. Les moines y fondent un monastère qui est à l’origine de l’actuel village du Rozier, au confluent du Tarn et de la Jonte. En 1075, les mêmes donateurs, entourés d’autres seigneurs confirment et augmentent ce legs : l’église de « Sancti Pétri de Stirpia » accompagnée de plusieurs terres et divers droits, fait partie des biens cédés à la nouvelle communauté.
Les moines bénédictins initient alors une mise en valeur du territoire. Il est tout à fait vraisemblable qu’ils aient installé sur place un petit groupe de religieux, très vite entouré d’un noyau de paysans, à l’origine de l’actuel village.
La construction de l’église débuta dès le dernier tiers du 11ème siècle par l’édification du chevet. Son plan, une abside centrale étroite et profonde, cantonnée de deux absidioles ; les maçonneries en petit appareil et la rusticité du voûtement en « cul de fou » poussent à dater cette partie de l’église du premier âge roman (1050/1080).
Très vite, l’accroissement de la population entraîna la construction d’une vaste nef de trois travées, qui vint se greffer, assez maladroitement d’ailleurs, sur le chœur d’origine. Elle était éclairée de trois fenêtres sur le flanc sud, dont on peut discerner quelques traces. Cette partie de l’édifice pourrait dater du tout début du 12ème siècle.
L’essor se poursuivant, une nouvelle campagne fut lancée quelques dizaines d’années après. On adjoignit à la nef deux collatéraux étroits voûtés en demi berceaux, comme ceux de « l’église mère » du Rozier. Pour assurer la communication entre les divers espaces, on éventra les arcs latéraux des murs de la nef, ce qui entraîna la disparition des fenêtres primitives. Enfin, une quatrième travée, faisant peut être fonction de narthex (vestibule réservé aux non-baptisés) s’éleva en avant de la nef d’origine. Le soin apporté à la maçonnerie et la présence à l’extérieur de grands arcs de décharge pris dans l’épaisseur des murs dénotent une maîtrise des techniques caractéristiques d’un art roman en plein épanouissement, datable, pour notre région des années 1140/1160.
Parallèlement, les bâtiments monastiques s’élevaient sur le flanc sud de l’église. Malgré des remaniements à diverses époques, l’ensemble architectural actuel a conservé sa structure médiévale : un vaste quadrilatère entourant une cour centrale, faisant office de cloître. Cette cour était munie d’une citerne, alimentée par les eaux de pluie recueillies sur les toitures, permettant d’une part la vie de la communauté, mais aussi les ablutions rituelles des moines avant le chant des offices.
Les Guerres de Religion des 16ème et 17ème siècles ont provoqué de gros dégâts à l’église et au prieuré, saccagés à plusieurs reprises. Une campagne de restauration, conduite entre 1635 et 1650 a donné à l’église son aspect définitif. La destruction du clocher primitif, dont nous ignorons tout, avait entraîné l’effondrement de la façade. On éleva alors une nouvelle travée vers l’ouest, occupée en partie par une tribune en bois aujourd’hui supprimée. Une nouvelle façade fut édifiée. Elle est percée d’un portail de profil rectangulaire décoré de moulures torsadées, survivance du style « renaissance » finissant et d’une fenêtre haute, transformée en oculus au 19ème siècle. Un clocher-mur à une arcade couronne l’ensemble.
L’église de St Pierre d’Etripiès renferme, outre une cuve baptismale monolithe d’origine très ancienne, une table de pierre de belles dimensions, portant des traces d’inscription latines. Cette pierre, longtemps employée comme seuil de la porte principale, semble être une table d’autel médiévale, peut-être celle des origines …

Par Philippe Chambon (in le site de la commune de Saint-Pierre des Tripiers)

 

Saint-Pierre des Tripiers par Emmanuelle Déchamps

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Date de dernière mise à jour : 02/04/2023

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