U comme Urbain

Le 24/11/2021 0

Dans Les Lozériens

Pas vraiment de U intéressant dans mes ancêtres... J'étais partie pour raconter la vie de François Urbain de Florit, alias l'abbé de la Tour, prêtre controversé de Meyrueis pendant la Révolution, vous vous rappelez, celui qui narguait le curé Arnal avant son exécution (voir la lettre G), mais bon, l'envie m'est passée. Et là, je trouve une foule de documents sur son fils, Alonzo. (Et oui, il était marié et père de famille !). Et miracle pour ma lettre, ce fils missionnaire, a pris le nom de Frère Urbain !

Et pourquoi cette photo d'île paradisiaque ? Vous allez le découvrir ...

La naissance d'Alonzo

L'abbé de la Tour renonça à ses fonctions ecclésistiques le 30 novembre 1793. Selon Achille Foulquier : "A peine vingt personnes, la plupart étangères à la paroisse, venaient assister à ses messes". Le 1er janvier 1794, il épouse la fille d'un de ses amis, Marguerite Védrines, âgée de 36 ans. Alonzo, leur seul enfant, nait le 9 octobre suivant :


Aujourd’hui vingtième vendémiaire l’an troisième de la République française une et indivisible à deux heures du soir par devant moy pierre Salgues officier municipal et public de la commune de Meyrueis departement de la Lozère élu le onzième germinal de la seconde année républiquaine pour recevoir les actes destinés à constater les naissances mariages et décès des citoyens est comparu en la salle publique de la maison commune françois urbain florit agent national de ce district domicilié dans ladite municipalité de Meyrueis y demeurant rue de l’Eglise lequel assisté de Daniel pelet cultivateur âgé de cinquante cinq ans et de Louis Caumel peruquier âgé de quarante huit ans, domicilliés dans la dite municipalité le premier rue de l’église le second rue de la place a déclaré à moy pierre salgues que Marguerite vedrines son épouse en légitime mariage est accouchée avant-hier dix huit vendemiaire à midy dans sa maison rue de l’église d’un enfant auquel il a donné le prenom d’alonzo florit. D’après cette déclaration que les citoyens David pellet et Louis caumel ont certifié conforme à la vérité et la représentation qui ma été faite de l’enfant denommé jay redigé en vertu des pouvoirs qui me sont delegués le present acte que françois hurbain père de l’enfant et les deux témoins David Pellet et Louis Caumel ont signé avec moy fait en la maison commune de Meyrueis les jours mois et an que dessus.

De Mende à Mangareva

Alonzo fut placé de bonne heure au collège religieux de Mende. Il prit les Ordres, sous le nom de Frère Urbain. Il devint professeur puis directeur d'école jusqu'en 1830 où son école fut fermée.

Ses supérieurs lui firent alors la proposition de partir pour la mission des Iles Gambier, en Polynésie.

Il s'embarqua en 1834, le voyage dura une année et le débarquement eu lieu au printemps 1835. Si l'on en croit l'abbé Foulquier (peu objectif, j'avoue), il savait tout faire (et a tout fait) : "ingénieur, filateur, instituteur, catéchiste, pharmacien, médecin et même chirurgien. Il bâtit des églises, des presbytères et des hospices. Il montait en même temps des ateliers de filature, de tissage et de confection".

Il mourut à Mangareva le 2 aout 1868 et eut, toujours d'après Foulquier, des funérailles quasi nationales.

Bigre, quel homme ! Recherchons si des traces subsistent dans les écrits !

Dans Gallica ... et autres

Dans le Bulletin de la société académique de Brest de 1870, on trouve tout un chapitre le concernant. Dans ce chapitre, un passage le décrit comme un personnage haut en couleurs, loin de l'image d'Epinal du missionnaire humble et dévoué que présente l'abbé Foulquier : 

" M. le comte de la Tour, était un petit vieillard profondément anémié, nerveux et très-irrascible. Voûté, et très maigre, il avait les jambes couvertes de cicatrices, le teint blême, jaunâtre, les cheveux blancs et rares, l'œil noir, vif et scrutateur. Me parlant de son antique lignée : J'appartiens, me dit-il, en se redressant fièrement, à la plus haute noblesse du midi de la France. Je me nomme le comte Urbain Florit de la Tour! Dieu et mon Roi, voilà ma devise, celle de mes aïeux! Mon Roi est dans l'exil, et moi dans cet Archipel, où je consacre humblement ma vie à apprendre à lire le latin, à écrire et à compter, à tous les pauvres enfants des Gambier."


On le trouve cité encore dans le livre de Paul Deschanel de 1888 : Les intérêts français dans l'Océan Pacifique racontant l'installation de la mission dans l'archipel :

A partir de cette époque, la mission s'implanta définitivement dans l'archipel : alors arrivèrent de France M. Rochouse, évêque de Nicopolis; les PP. Cyprien Liausu, Armand Chosson, Guillemard; un frère lai, le vicomte Urbain Florit de La Tour, et deux habiles ouvriers, les frères Gilbert Soulié et Fabien (1836). La mission fut établie sous l'invocation de Notre-Dame de la Paix.


Plus contemporain, sur le site de la Paroisse de la Cathédrale de Papeete, un article et une intéressante bibliographie lui sont consacrés :

LATOUR DE CLAMOUZE Comte Alphonse de (Fr Urbain, s.s.c.c.)

LATOUR DE CLAMOUZE, comte Alphonse de (Frère Urbain). 1794-1868. - Frère coadjuteur de la congrégation des Sacrés-Cœurs de Picpus. Né le 7 octobre 1794 à Meyrueis (Lozère) d'une famille noble ruinée par la Révolution. Son père est percepteur à Florac. Elevé par les Pères des Sacrés-Cœurs à Mende, il rentre dans la congrégation, mais n'y fera jamais de vœux, restant dans la classe « des frères donnés ». Enseigna à Mende. Mgr Rouchouze* de passage en France l'entraîne avec lui. Il part aux Gambier en 1835 et y arrive, par la Delphine, avec l'évêque, le 9 mai 1835. Instruit, organisateur, habile de ses mains, totalement dévoué à la mission, le Frère Urbain lui rendra de grands services. Il établira des ateliers de filature, de tissage et de confection ; apprendra aux femmes à tricoter. Aidera les Frères Gilbert Soulié*, Fabien Costes" et M. Henry* dans leurs importants travaux de construction. Il a apporté une « presse lithographique » dit un document contemporain. Une lettre du Père Laval* dit même « typographique ». « M. Urbain s'est mis à l'oeuvre, il a disposé son imprimerie, aidé de deux jeunes indigènes. Il débute par un petit in-8° qui renfermera, outre la doctrine chrétienne, les prières de la messe, les vêpres et les complies. Malheureusement nous n'avons que très peu de papier. Et je ne sais comment nous pourrons nous procurer celui qui nous sera nécessaire. » Mais c'est surtout comme enseignant que le Frère Urbain rend les plus signalés services. Il a installé à Aukena une école « dont le but principal était de former des instituteurs, des catéchistes et surtout des prêtres. Ces enfants, du moins les plus intelligents, devaient par conséquent étudier le latin et les parties les plus importantes de notre enseignement secondaire... Ces enfants s'entretenaient toujours en français entre eux… leurs phrases ne sont pas toujours irréprochables mais la prononciation est excellente... vous ne sauriez croire combien il a fallu d'efforts et de patience à M. de la Tour pour en arriver là » (mai 1851). Le Frère Henry faisait aussi fonctions de médecin et d'infirmier. C'était un homme cultivé et curieux. Dès 1838 il avait remis à Dumont d'Urville une « petite collection de coquillages » et un « vocabulaire assez complet de 700 ou 800 mots très précieux pour mes études de philologie océanienne ». Il mourut impotent à Mangareva, le 2 août 1868. Les indigènes disaient : Ko tura anake : La Tour n'a jamais eu son semblable ! Il est enterré sous une inscription latine dans l'église Saint-Michel de Rikitea.

Bibliographie. - L'auxiliaire de la mission de Gambier ou M. de La Tour de Clamouze (Annales de la Congrégation des Sacrés-Cœurs, t. 6, Paris, 1880, p. 385-397,497-509). - Notice au sujet du comte Alphonse de Latour de Clamouze, en religion Frère Urbain, coadjuteur « donné » de la Congrégation des Sacrés-Cœurs, Mende, 1897,25 p., 22 cm. Notice d'abord parue dans la Semaine Religieuse de Mende. P. A. Lesson, Voyage aux îles Mangareva, Rochefort, 1845, a laissé, p.28 et sv. un amusant portrait de M. de Latour « linguiste, imprimeur, botaniste et lanceur de montgolfières ». Voir également H. Laval, Histoire de Mangareva. Ere chrétienne, 1966.

In Tahiti Heritage - Encyclopédie collaborative du patrimoine polynésien

Une œuvre originale, l’étonnant portail à l’entrée du quai de Taravai (Gambier) qui s’ouvre sur une belle allée en gazon qui conduit à l’église Saint-Gabriel.

La construction du portail de Taravai commence en 1861, sous l’œil averti de frère Soulié. L’ouverture de la porte est assez étroite, mais tout autour le portail se développe en formant plusieurs voussures de style gothique, la dernière étant garnie de coquillages suivant une idée des frères Urbain de la Tour et Soulié. L’ensemble est complété par des colonnettes avec pinacles de chaque côté et par un fronton qui s’élance au-dessus du portail, dans l’axe du clocher.

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Le couvent de Rouru, créé par le Père Cyprien en 1836, témoigne de « l’effort de la mission pour la promotion des femmes aux Gambier« . Au temps de sa splendeur il abritait 150 personnes, femmes, jeunes filles et enfants qui vivaient en communauté. On accédait à cette vaste propriété, fermée de murs et contenant plusieurs corps de bâtiments séparés et indépendants, par une belle allée d’orangers, le chemin des sœurs, qui conduit à un portail monumental.

Dans ce petit couvent, on apprend à lire à écrire à ces jeunes filles, vouées aux pratiques journalières de la religion. À leurs heures de loisir, elles doivent chacune se livrer à la culture d’une petite étendue de terrain qui leur est concédée, puis ce sont elles qui récoltent le coton, en épluchent la bourre avant qu’il soit livré à la fabrication des étoffes. L’écriture de ces jeunes filles est généralement bonne… Leur papier ordinaire consiste en feuilles de bananiers séchées pour les débuts, et elles n’ont du papier de chiffon que quand elles sont déjà avancées en calligraphie. M. de La Tour (Frère Urbain) a extrait du brou de noix de cocos le principe astringent avec lequel il compose l’encre à écrire »…

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