Les frères Pourquery (Épisode 7 : Fortuné, dit Beaupré)

Le 05/04/2022 0

Dans Les Lozériens

Le plus jeune des frères Pourquery, Pierre Fortuné, était militaire dans l'armée révolutionnaire. Il fut nommé capitaine de la garde révolutionnaire de Rivière chargée de lutter contre les "brigands" et les réfractaires au service. Il fut assassiné avec son oncle l'abbé de Boyne en représailles, un jour d'octobre 1801, en se rendant à Séverac le Château.

Signature fortune pourquery

L'an mille cept sant soisante sis et le trantième jour du mois d'actobre a esté baptisé Pierre Fortuné né le jour présédant fils légitime et naturel de maittre antoine jen pourquery avocat en parlement et coseigneur du mandement de Payrelade et de damme janne rosier mariés du présent lieu du bourg, parrain Pierre Courtot domestique chez le susdit maittre antoine jean pourquery soussigné, présent Louis verdier travailleur du présent lieu qui requis de signer a dit le savoir.


Fortuné, le dernier de la fratrie, est né en 1766. Quinze ans le séparent de son frère ainé. Lors de son baptême, aucun membre de la famille n'est cité. Son parrain est le domestique de la famille, et aucune marraine n'est mentionnée. Et l'othographe du curé est ... plusqu'hésitante !

Était-il franc-maçon ?

La signature de Beaupré présente trois points alignés entre deux traits. Beaucoup de personnes y voient une appartenance à la franc-maçonnerie.

Dans le n°3 de Théma : les signatures de nos ancêtres (Thierry Sabot, éditions Thisa), on peut lire la chose suivante : "La triponctuation des signatures n'est pas spécifiquement maçonnique, la mode des trois points était trop répandue et banalisée à la fin de l'Ancien Régime."

Donc en l'absence de documents attestant le rattachement de Beaupré à une loge quelconque, on ne peut le savoir. J'ai pu remarquer que ces signes étaient souvent présents dans les signatures de notables locaux, sans doute un effet de mode ou de mimétisme ...

La garde nationale de Rivière sur Tarn

Le 20 janvier 1801, Beaupré fut nommé capitaine de la garde nationale. La liste des gens sous ses ordres est indiqué ci-contre. Un billet dont le texte est reproduit ci-dessous reprend la composition des officiers :

Ce jourd’huy trente nivose de l’an neuf de la république française les citoyens nommés par les maires et adjoints pour composer les listes des citoyens les plus propres au service de la garde nationale et à la sureté de leur localité ainsi qu’il est prescrit par l’arrêté du préfet du département en date du 19 nivose mois courantsont requis par le maire à l’effet de l’organiser ont nommés
Capitaine le C(itoye)n Pourquery Beaupré
Lieutenant le C(itoye)n Julien
Sous lieutenants les C(itoye)ns Marcelin Plombat et Théodore Sauvage
Sergents B(aptis)te Durand, P(ier)re Plombat, Estienne et Ant(oine) Guers
Caporaux Antoine Loubat, Pierre Puech, J(ea)n Pierre Vaissiere Guil(laume) Affairoux
et ont signé ceux qui ont seu le faire.
Sauvage sous lieutenant – Julien – Loubat – Plombat – Puech – Vayssiere – Guers

Les missions de la garde nationale

Dans une liasse de documents trouvés aux archives de l'Aveyron, outre la liste ci-dessus, se trouve une copie de la lettre du général Gouvion, commandant en chef de la 9ème division militaire, située à Montpellier. Cette lettre adressée au général Mignotte, commandant dans l'Aveyron, lui indique les ordres à donner aux capitaines des gardes nationales. Elle est datée du 17 fructidor an 9 (soit le 4 septembre 1801) Suit la transmission des ordres de Mignotte au lieutenant de la gendarmerie nationale de Millau.

Copie des ordres notifiés à la mairie de Rivière le 17 fructidor an 9.
au quartier général à Montpellier le 27 thermidor an 9 de la Rep Fran.
Gouvion Général divisionnaire, commandant en chef la 9e division militaire.
Au Général Mignotte commandant dans l’Aveyron.

J’ai reçu votre dernière lettre, mon cher général, les déserteurs doivent être poursuivis sans relache, et je vous invite surtout à faire arrêter le nommé Deltour du St Sauveur, les ordres que j’ai donnés contre les déserteurs doivent être exécutés jusqu’à ce que le gouvernement prescrive d’autres mesures faites pour les mesures sévères contre les mauvais sujets, que les autorités civiles et les habitants qui se plaignent de la présence des troupes fassent arrêter les brigands que plusieurs d’entre eux (?) protègent encore, et je leur promets alors de retirer les troupes, mais pour pouvez les assurer au contraire, que si on persiste à donner asile aux brigands j’enverrai dans l’Aveyron de nouvelles troupes pour y renforcer celles qui s’y trouvent, je vous salue. Gouvion signé pour copie conforme.

Le général de Brigade mignotte commandant la force armée de l’Aveyron
Au citoyen Barthélémy lieutenant de la gendarmerie nationale commandant à Millau.

Je vous adresse ci après citoyen lieutenant copie conforme d’une lettre du général divisionnaire Gouvion commandant la 9e division militaire en date du 27 thermidor dernier relative aux poursuites à exercer contre les déserteurs, vous vous empresserez d’en transmettre copie ainsi que du présent ordre au commandant des portes de St Jean du Bruel, Séverac, Mostuéjouls, Le Bourg de B.. Veyreau et St André, afin que chacune s’y conforme dans son arrondissement respectif. Au reçu de la présente, chaque commandant se présentera devant les citoyens maires de la commune où il se trouve, pour lui demander la liste des déserteurs qui peuvent s’y trouver, ils prendront d’abord de concert tous les moyens pour parvenir à leur arrestation et ensuite la troupe s’établira en garnison sur les parents ou receleurs des fuyards et récalcitrants à raison de vingt sous par jour pour chaque soldat à pied et de quarante pour les hommes à cheval, cette opération devra commencer par les communes reconnues pour favoriser les brigands et contenir le plus grand nombre de déserteurs, elle aura lieu conformément aux ordres que j’ai présédemment donnés aux différents chefs de détachement, l’indemnité de ces derniers ne pourra excéder celle qui leur est fixée par la loi. Surtout que l’appat du gain ne soit pas pour la troupe un motif pour se ralentir à la poursuite des brigands, cette gratification outre celle qui leur est promise ne leur est accordée que pour adoucir la peine qu’ils essuient dans ces courses, je la suspendrai définitivement si je m’aperçois qu’on … tant soit peu sur cette partie. Il est bon que les commandants du détachement seront instruits que tous les conscrits et réquisitionnaires du département ayant déserté en route ou au dépot établi à Rodez ils doivent être recherchés comme déserteurs au moyen des chassseurs que vous avez à Millau et en les établissant en garnison ainsi que les gendarmes il vous sera aisé de forcer le départ et d’arrêter les déserteurs de Millau ou des environs, que je vous ai si souvent recommandé, vous communiquerez au Sous préfet Cn Randon la présente ainsi que la copie de la lettre du général Gouvion, cette dernière a du lui être transmise par le préfet sainthorent signé Mignotte.

L'assassinat de Beaupré

Par son engagement dans la lutte contre les brigands, Pourquery Beaupré s'attira la haine des bandes avoisinantes, surtout celle des Meillou. Des attaques du château des Pourquery et des menaces de mort prononcées eurent lieu dans l'été 1801. Mais les évênements se précipitèrent la veille de la foire de Séverac, le 19 octobre de cette année. Je laisse la parole à Marc Vaissière et Pierre Dumas qui ont raconté l'assassinat des Pourquery en ces termes :

La veille ou l'avant veille de la foire du 19 octobre 1801, Beaupré vint trouver Jean Pelat, un charron originaire du Maynard qui travaillait depuis quelques temps au village. Il l'informa de son intention de se rendre le lendemain à la foire de Séverac pour acheter des boeufs et le pria, comme il le faisait depuis quelque temps, de vouloir l'accompagner car il se sentait en danger à cause des Meillou.
Le lendemain, ils partirent ensemble, et de bon matin, accompagné de Pourquery Boyne, l'oncle de Beaupré. Par précaution, ils avaient pris avec eux leur fusil double. Tout au long du chemin [...], ils se tirent sur leurs gardes en craignant à chaque instant de se trouver en face des brigands. Entre 8 et 9 heures, quand ils arrivèrent en vue de Séverac en haut de la côte de Cayrac, ils se crurent alors à l'abri du danger. Mettant pied à terre, Beaupré était le premier de la file et conduisant son cheval par la bride. Pelat venait ensuite, tenant le cheval de Boyne et celui-ci suivait à une vingtaine de pas environ.
A un moment, Pelat se retourna et aperçu alors dans un ravin qui longe le chemin, trois hommes [...]. Aussitôt, il entendit quelqu'un qui criait : Feu ! Un coup de fusil suivit et atteignit Beaupré, le tuant sur place.
Il vit ensuite au bout du ravin celui qui venait de tuer son maitre. Pelat riposta instantanément et crut avoir blessé le meurtrier. [...] L'un des agresseurs tira un coup de fusil sur l'abbé Pourquery qui prenait la fuite, mais, vu son grand âge, il ne fut point assez rapide. Les bandits le rejoignirent et lui tirèrent deux autres coups de fusils qui le tuèrent. Pelat, lui, réussit à s'enfuir du côté de la Bastide et courut donner l'alerte à Séverac.

(In les Brigands du Bourg - P Dumas et M Vaissière)

La fin de cette série prochainement dans :

Les frères Pourquery (Épisode 8 : le bilan)

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