Y comme Yersinia pestis

Le 29/11/2021 0

Dans Les Lozériens

Tout commença en septembre 1720, à une foire de Saint Laurent d’Olt, par la faute de cet habitant de Corréjac et de ce galérien évadé qui avait fui Marseille infectée de la terrible maladie de contagion. Les deux hommes se rencontrèrent, allèrent boire ensemble et le forçat vendit au paysan quelques hardes…. Mais voici l’histoire.

L'arrivée de la peste

C’est un navire à voiles en provenance du Levant (région de la Syrie actuelle), le Grand-Saint-Antoine, qui amena la peste à Marseille. Ce navire transportait des étoffes de soie destinées à être vendues lors de la foire de Beaucaire dans le Gard, qui étaient porteuses de puces atteintes de la peste. Lors de la traversée, plusieurs personnes décèderont.

Seulement, certaines personnes quittant la ville, ne savaient pas qu’elles étaient atteintes de la maladie et la transmettaient donc dans les régions où elles se réfugiaient. C’est notamment le cas en Gévaudan (l’actuel département de la Lozère) où après le contact avec un marseillais, un habitant du hameau de Corréjac, dans la commune de La Canourgue, mourut le 24 novembre 1720.

Le 12 mai de l’année suivante, une quarantaine (confinement ?) est imposée. A Laval du Tarn, le curé achète une statue de la vierge pour l'installer sur l'autel de l'église afin "d'obtenir de Dieu par son intercession d'être préservés du mal contagieux, dont la ville de la Canourgue est affligé, et d'autres lieux aussi".

Achat vierge laval

A Saint-Georges de Lévéjac, des pages entières de registres répertorient tant bien que mal les victimes de la contagion. Celles-ci ne sont même plus inhumées au cimetière de la paroisse, mais directement sur place.

Peste saint georges 1721

 

 

 

 

Le blocus

Le 2 et le 3 juin 1721, « Monsieur de Rothe, lieutenant général des armées du roi et commandant de l’ordre de Saint-Louis » fait dresser un plan de La Canourgue et de ses environs. Autour de La Canourgue, une muraille est déjà présente mais les autres hameaux concernés n’en possèdent pas et Monsieur de Rothe ordonne donc l’édification d’une palissade. 

Le blocus s’avère inutile puisque l’épidémie atteint Marvejols le 2 juillet, amenée par un soldat de ce blocus qui décèdera ce même jour, puis c’est au tour de la ville de Mende d’être touchée le 21 août. Des mesures plus importantes sont prises afin de lutter contre le fléau et le 5 août, une ordonnance royale impose l’isolement du Gévaudan et la mise en place d’un cordon sanitaire et militaire est faite le long du Tarn et de l’Allier.

Malgré ces mesures, certaines personnes tenteront de franchir le cordon sanitaire comme Jeanne Dufrène, habitante du hameau de Florac d’Auroux, le 1er octobre 1721, qui veut se rendre de l’autre côté du cordon, là où sévit la peste alors que dans la paroisse d’Auroux, là où elle vit, le fléau n’a pas touché la population comme c’est aussi le cas dans la région de Langogne, qui ne sont donc pas concernées par le cordon. Jeanne Dufrène est aussitôt tuée par les soldats, qui ont l’ordre de ne laisser passer personne, comme on peut le voir sur l’extrait du registre paroissial d’Auroux :

Jeanne dufresne

Un bien étrange mariage

Mariage fages malzac

Le vingt cinquieme juin mil sept cent vingt deux après avoir publié au prome de la messe de parroisse pendant trois dimanches consecutifs les bans de mariage entre Sr françois fage greffier de la juridiction de St chely et vicomte d’hauterives fils naturel et legitime de Mr antoine fage et de feu catherine gache habitant dud St chely de tarn, d’une part et francoise malzac fille naturelle et legitime de me guillaume malzac et d’anne fage du lieu de boujassac en notre parroisse de laval, ne nous a paru aucun empechement ni opposition quelconque vû le certificat et congé de mr le curé de st Chely nous avons reçû le mutuel consentement et béni le mariage desd parties sur le bord de la rivière du tarn, le Sr fages étant au-delà et nous et lad malzac et les témoins au deça, à cause de la ligne formée le long de la rivière au sujet du mal contagieux dont plusieurs lieux de ces quartiers ont été attaqués, le tout en présence de messire Jean-Baptiste de Maillan, seigneur de la Caze et autres lieux, led Malzac père de lad épousée, Sr Pierre Jean clerc tonsuré demeurant avec nous curé, signés avec lesd parties, led fages en particulier aïant signé avec les précautions nécessaires, présents aussi Etienne Belvezé valet aud château de la Caze illiterré de ce enquis. Fait où que dessus le susdit jour en foi de ce.

EDT 085 GG 1 - Baptêmes, mariages, sépultures Laval du Tarn - (1718-1724)

Le total des victimes est de 5678 morts pour tout le Gévaudan : là où la peste a frappé, elle a emporté un habitant sur trois.

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